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Fiat lux
9 décembre 2007

Pour toi

On m'a dit, Mais c'est ça, l'amour, mais si, mais si, crois-moi, tu vois bien que ... que c'est facile.
On m'a dit, Mais c'est ça, l'amitié, mais si, mais si, je t'assure, tu n'as pas besoin de chercher plus loin.
On m'a dit, C'est là, arrête-toi, relève la tête et regarde cette splendeur. Cet ordre !
On m'a dit, Allons, tu n'es pas une bête, pense à ces choses-là et tu verras comme tout devient clair. Et simple !
On m'a dit, Tous ces blessés à mort, avec quelle science on les soigne.
Assez !
Je me dis... quelquefois, Clov, il faut que tu arrives à souffrir mieux que ça, si tu veux qu'on se lasse de te punir... un jour.
Je me dis... quelquefois, Clov, il faut que tu sois là mieux que ça, si tu veux qu'on te laisse partir... un jour.
Mais je me sens trop vieux, et trop loin, pour pouvoir former de nouvelles habitudes.
Bon, ça ne finira donc jamais, je ne partirai donc jamais.
Puis un jour, soudain, ça finit, ça change, je ne comprends pas, ça meurt, ou c'est moi, je ne comprends pas, ça non plus. Je le demande aux mots qui restent... sommeil, réveil, soir, matin. Ils ne savent rien dire.
J'ouvre la porte du cabanon et m'en vais. Je suis si voûté que je ne vois que mes pieds, si j'ouvre les yeux, et entre mes jambes un peu de poussière noirâtre. Je me dis que la terre s'est éteinte, quoique je ne l'aie jamais vue allumée. Ca va tout seul. Quand je tomberai, je pleurerai de bonheur.

 

© Beckett, Fin de Partie


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